Catégorie : Techniques et Stratégies
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Cette partie vise à rechercher et à analyser les passages de marque. Au départ, je pensais être exhaustif dans ma démarche et espérer traiter tous les cas. En fait, beaucoup trop de paramètres influent sur nos choix. J’ai donc dû me résoudre à ne voir que les cas typiques pour ne pas m’embourber dans des explications à n’en plus finir.

Je vous rappelle que toutes les situations de course sont bonnes à analyser. N’hésitez pas à aller au-devant de vos amis pilotes pour en discuter, comparer vos analyses. Faites vos critiques par rapport à vos roulages et surtout ne vous endormez pas à suivre systématiquement votre prédécesseur.

2 Les passages de marque

2 1Bouée de virage au vent

Si l’on pense que le char à voile est un sport d’anticipation, cette phase de course caractérise justement l’état d’esprit que tout pilote de char doit acquérir. Il n’existe rien de plus anormal par exemple que d’allonger sa route pour aller plus vite. Et pourtant !!! Mais ce que l’on voit ici, ce sont vraiment les cas généraux et je me répète, il est bien difficile de traiter de tous les cas de figure qui peuvent se présenter en course.

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L'important est de prendre le maximum d'accélération pour aborder le bord de portant. Ce passage conditionne la réussite et la vitesse pour les1er bords de descente sous le vent. Il est d'autant plus important si les bancs de roulage sont étroits. Parce que dans ces cas, les pilotes n'ont pas la place de relancer le char en cas de décrochage de la voile. Il faut donc acquérir le maximum de vitesse dès que possible. Pour cela, il ne faut pas hésiter à se mettre pratiquement vent de travers pour permettre d'accélérer. Le terrain perdu au prés sera regagné largement sur le bord de portant.

Bien simple sur le papier, mais l’appliquer implique des acquis. Il faut savoir projeter ses trajectoires, penser où l’on va passer 2, 3, 5mn après, ce qui implique bien sur d’avoir su repérer le type de terrain, la grandeur des bancs et les principaux passages et leurs situations par rapport au parcours sans parler des adversaires… (que l’on verra dans un prochain chapitre)

22 Passages répétés

A force de passer au même endroit, les chars ont tendance à dégrader le terrain, surtout si le sable n’est pas dur. Au début, on n’hésite pas à s'éloigner de plus en plus de la bouée pour ne pas perdre de vitesse en recherchant les zones où les passages des chars étaient les moins fréquents. Et puis, il faut se rendre à l’évidence, cela devient de plus en plus difficile. Soit on fait le grand tour, en passant par l’extérieur, soit on recherche au ras du poteau de virage les zones restées encore vierges de tout passage. Cela a l’avantage aussi de passer les ornières à la perpendiculaire (pour ne pas planter la roue sous le vent dans le sillon) et donc de moins ralentir. (A vérifier si vous voulez)

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2 3 Passage dans une zone de ralentissement

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Il se peut que la bouée de virage soit placée dans une zone de ralentissement (bâche plus ou moins profonde, sable mou, riddins prononcés...). La meilleure solution pour la traverser est de prendre le maximum de vitesse avant, et de la passer vent de travers, allure où la force propulsive est la mieux orientée et la plus rentable.

Ne pas oublier que plus ces zones sont courtes, mieux c’est !!! Je sais, c’est évident. Alors pas d’hésitation, on les coupe toujours à la perpendiculaire. Rappelez -vous GRAVELINES 2000 où pour passer le banc de mou il fallait passer en se lançant vent arrière sur la perpendiculaire du banc de mou. Comme quoi, c’est difficile de traiter de cas généraux. On peut toujours trouver le contre exemple d’une généralité !!!

3 Les plages à bancs

C’est la particularité des plages du Nord pas de Calais. La plage n’est pas plate et les dénivelés engendrent des zones de terrain de consistance inégale. Les passages de banc à banc se font obligatoirement par les zones proches des caniveaux. C'est le seul endroit où le sable est dur.

On recherchera en course à identifier, à repérer ces zones par rapport au parcours. On peut le faire avant la course si le directeur de course l'autorise mais on peut aussi essayer de prendre de la hauteur en montant sur les dunes. On essaiera de mémoriser leurs situations en prenant des repères à terre (amer) ou en comptant

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mentalement le temps qui s'écoule entre chaque passage (C'est dur au début mais on s'y fait). On peut aussi compter leur nombre à chaque fois que l'on en passe un de façon à tourner au bon endroit. Cependant certaines plages comme à La Panne, on peut se permettre de passer ces zones sans trop perdre de vitesse. C’est encore une question de choix, de prise de risques ou parfois les circonstances font qu’il est impératif de passer ces zones (Par exemple, si l’on descend vent arrière et que l’on perd sa vitesse ou si l’on veut allonger son bord de prés)

Comment reconnaître un passage ?

Sa couleur est différente. Le sable passe de la couleur jaune pâle (sable mou) à marron gris pour le sable dur. Les passages sont toujours dans les bas des dénivelés. Cela veut dire qu’en haut des bosses, le sable est (presque) toujours mou. Si l’on dessine la coupe du schéma au dessus, on aurait quelque chose comme ceci :

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3 1 Les erreurs possibles :

Passer 2 fois le caniveau parce que l’on n’a pas repérer ses méandres.

Effectuer une manœuvre dans le caniveau (virement de bord ou empannage).

Remonter le caniveau et passer dans l’eau sur toute sa longueur.

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3 2 Se repérer / la marée

C'est bien sûr une évidence, toutes les plages se recouvrent par la marée. Cela influe fortement sur notre espace de jeu. Quoi de plus normal, donc, de prendre au moins l'heure de marée basse et le coefficient de marée (plus il est important, plus la marée remontera vite). Cela vous évitera de faire le bord de trop à la mer et de vous retrouver... les roues dans l'eau.

3 3 Les virements

Que se soit vent de face ou vent arrière, les virements ont pour conséquence de ne plus vous propulser pendant toute leur durée. Il faut donc systématiquement privilégier ces manœuvres sur le terrain le plus dur possible en évitant tous les obstacles que l'on trouvera sur la plage (riddins, sable mou, bâches..).

Le virement face au vent ou dos au vent est une manœuvre tactique. Elle consiste avant tout en un gain au vent pour le virement face au vent et un gain sous le vent pour l'empannage. Donc, il ne faut pas hésiter si le terrain est bien dur, à allonger sa route pour gagner le plus possible au vent ou sous le vent. Mais on le verra dans un chapitre suivant, il permet aussi de se dégager des adversaires lorsque l’on veut évoluer dans du vent frais ou bien se recentrer par rapport aux adversaires directs. Suivant les situations de course, on peut être amener à se rapprocher des adversaires soit pour les contrôler et les empêcher de doubler, ou encore ne pas prendre de risques et les voir s’éloigner sur une autre partie du parcours.

Pour l’instant, nous devons considérer que l’on roule seul sur la plage. Même sans adversaires, on peut toujours se poser des questions sur les choix de trajectoires.

Ne tirer que des petits bords sur du sable dur et lisse ou continuer jusqu’au riddins pour allonger sa route ? En fait, seul c’est difficile de se rendre compte. Je pense que cela dépend beaucoup de la force du vent. Plus il est fort, plus on allonge ses bords. Ensuite, cela dépend des réglages du char :

  • La pression des pneus (on peut privilégier le passage dans le riddins en dégonflant ses pneus, s’il n’y a pas d’eau)
  • La souplesse de l’essieu (on peut penser que plus il est souple, plus il sera performant dans le riddin)
  • Du poids de l’ensemble (plus on est lourd, plus on aura de mal à redémarrer dans les manœuvres)

3 4 Rouler sur une plage à bancs

On peut se poser beaucoup de questions lorsqu’on roule sur une plage à banc. Suivant l’inclinaison de la plage, on peut se demander quel angle par rapport au vent il faut choisir. Personnellement, je préfère faire de la vitesse dans le bord qui remonte avec un virement de bord serré, et je serre le vent dans le bord qui descend avec une recherche de gain au vent dans le virement de bord.

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4 Micro-météo et couloirs de vent

J’ai longtemps hésité à faire ce chapitre parce qu’il est difficile à exploiter en char. Car ce sont quand même des conditions spéciales que l’on ne rencontre pas souvent et difficiles à exploiter. Mais au moins il faut les connaitre pour savoir réagir correctement.

4 1 l'effet venturi

Le vent est accéléré quand il traverse un étranglement. Lorsqu'il passe au travers d'une dune et à fortiori 2 immeubles, le vent augmente en intensité. Cela est valable dans les 2 sens, de la terre vers la mer ou de la mer vers la terre. Lorsque l'on passe de telles zones, il faut s'attendre à une survente et donc à abattre et ouvrir légèrement sa voile pour accélérer encore.

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4 2 l'effet venturi/caniveau

Lorsque le vent passe au travers d'une dune ou entre 2 immeubles, l'accélération du vent a tendance à vider la bâche à cet endroit créant un caniveau. Il faut s’attendre donc à une survente associée à une diminution du vent vitesse puisque les chars ralentissent au passage de l’eau. Les trajectoires doivent donc être modifiées.

Si le vent est faible, on passe les caniveaux le plus travers au vent. S’il est plus fort, il faut abattre et choquer sa voile.

4 3 Les différents systèmes de vent

Si lors des compétitions, on pouvait relever les différents azimuts des vents, on s'apercevrait de l'existence de variations insoupçonnables. En minutant les rotations et en relevant la direction du vent à l'aide d'un compas, on pourrait observer 3 types de courbe:

Vent stable

Vent oscillant

Vent évolutif

Le cas du vent stable n'a pour un pilote aucune incidence sur le choix de ces trajectoires. Il ne devra prendre en compte que le terrain et ses adversaires. Le vent est stable si les variations en direction ne dépassent pas 5°.

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2 le vent oscillant

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Les vents oscillants sont des bascules de vent non définitives qui peuvent acquérir un certain rythme. Mais ces variations qui se traduisent par des adonnantes et des refusantes sont rarement utilisées par les pilotes de char à voile. En effet, mis à part les cas des plages très larges où une refusante de 15° peut être significative, la perte au virement est tellement importante que l'on se préoccupe assez peu des rotations de vent inférieures à 15°.

3 Les vents évolutifs

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Comme le schéma l'indique, les vents évolutifs tournent progressivement vers une nouvelle direction (souvent vers la droite). Ils nous intéressent parce qu'il faut préserver le côté gauche de la plage. Si l'on venait à se mettre du côté terre, on prend le risque de devoir tirer des bords et de voir "débouler" les chars côté mer (cas du char B).

L'inverse sur le bord de portant existe aussi. Il est primordial de rechercher la refusante, synonyme d'accélération et de bord plus direct. Dans notre cas, les chars ont intérêt à se mettre côté terre. Il faut quand même reconnaitre que ce n’est pas facile d’exploiter ce genre de situation.

Ce type de vent est typique du vent que l’on peut trouver l’été sur nos plages lorsqu’il fait chaud. Une brise thermique peut s’établir et par la force de Coriolis, le vent tourne vers la droite en forcissant. Connaitre ce vent est intéressant car dans ces cas présents, il vaut mieux préparer ses sacs de sable. Le vent peut monter jusque force 5.

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4 4 Les effets de pointe

Le relief a pour effet de dévier le vent et de lui faire prendre la courbure de la plage sous l’effet des hautes et basses pressions relatives. Cela est d'autant plus marqué que le relief est important. Le pilote pourra donc remonter à l'aide de 2 adonnantes en faisant attention de ne pas se mettre derrière la pointe (zone déventée)

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4 5 Les effets de baie

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Nous venons de traiter les conditions de réussite pour un roulage seul, sans adversaires.

Dans le prochain chapitre, vous vous en doutez, nous parlerons des différents cas avec adversaires et du règlement. Je pense que les compétiteurs n’auront pas appris grand chose de fondamental mais les bases sont désormais expliquées.

J’ai juste un regret, de ne pas pouvoir tout voir dans le détail car en définitif, chaque course, chaque roulage est un cas particulier.

Comme le disait Bertrand LAMBERT, ce qui manque, c’est l’état d’esprit du roulage, les conditions de vigilance nécessaires pour bien rouler. Car c’est la somme de petites erreurs qui fait que l’on roule un ton en dessous, c’est par exemple le timing dans les remontées au prés, c’est l’endroit un peu plus large du banc où l’on pourra accélérer de nouveau dans la descente au vent arrière…

Et puis, la forme même de l’écrit est aussi frustrante. Là ou un roulage ne peut se concevoir que dans sa globalité, sa « théorisation » ne peut s’admettre que par un décorticage des différentes situations. Et comme elles sont nombreuses, forcément on passe à côté de certaines qui mériteraient un développement.

En définitif, le sujet est trop vaste pour pouvoir être appréhendé en quelques schémas et explications. Si être performant en char à voile consiste à avoir la meilleure vitesse sur la meilleure trajectoire, on ne peut négliger qu’en char à voile, la trajectoire influe énormément sur la vitesse (je sens que je fais compliqué).